Theo Romain
THÉO ROMAIN-SOBOTA
︎ — 1994




BORDER - TRIENNALE D’ART CONTEMPORAIN, Le Carillon, Tournai, BE
Exposition collective | 18.06.2022-11.09.2022




BORDER : triennale d’art contemporain



En 2015, l'Allemagne, avec à sa tête Angela Merkel, est le premier pays européen à ouvrir ses frontières aux demandeurs d'asile, après la parution dans la presse de la photo d'Aylan Kurdi, un enfant syrien mort en mer et retrouvé échoué sur une plage turque. Le sentiment de solidarité qui emporte l'Europe cette année-là connait un terme violent en novembre avec les attentats de Paris. Les événements de novembre 2015, ainsi que le contexte politique plus large, mènent à un durcissement des politiques européennes et nationales en matière d'immigration qui donnent le ton pour les années suivantes.L'expression « crise migratoire » devient de plus en plus récurrente dans les médias occidentaux et témoigne de la vision à court terme prédominante dans les politiques migratoires européennes, héritées des années 90, fondées sur le contrôle et la mise à distance (Rodier C., 2018). L'Europe se barricade, décide de mettre entre parenthèses les questions liées à l'accueil des exilés et investit dans la sécurité : édification de murs aux frontières, dispositifs de filtrage et de tri des personnes désirant entrer sur le territoire, blocage des bateaux de sauvetage, négociations avec les pays frontaliers pour tenter de réduire le nombre d'immigrants en Europe... Ces dispositifs coûteux semblent d'autant plus irrationnels, que leur inefficacité est prouvée et que les chiffres de l'immigration en Europe sont bien dérisoires à l'échelle de la population européenne et mondiale.Ces choix politiques nient la pérennité du phénomène de migration dans l'histoire et en relation avec les autres « crises » planétaires: politiques, économiques, écologiques ou encore démographiques qui concourent nécessairement à une augmentation des mouvements de populations au long terme. Mouvements relevant par ailleurs d'un phénomène de brassage culturellement et économiquement bénéfique.Comment sortir de la sidération face à l'absurdité et à la violence inouïe des actes et des discours ? Comment constituer de nouveaux récits qui remettent en jeu nos croyances et offrent des lignes de fuite ?Au Carillon, les artistes prennent appui sur nos références communes pour recomposer des impressions de réalité se jouant de nos habitudes. Ils construisent des récits complexes, y incorporant les contradictions au cœur de nos identités européennes. Ils donnent la parole, créent des accès à des espaces en marge, dans les interstices. Les expériences humaines dont ils se portent témoins nous laissent apercevoir la possibilité de l'universel en tant que sensibilité au monde. Un universel pluriel, complexe qui porte un espoir, celui d'un dialogue « tourbillonnaire »: un système qui « profite de sa crise pour se ressourcer et se renouveler » (Morin E., 1990).


La triennale BORDER est une plongée dans les expériences humaines de frontières, les frontières que l’on porte en soi, les récits d’exils et de migrations passés ou actuels.






© Crédit photo : Gordon War

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